L’article du site Lepetitjournal.com publié mercredi 18 juillet 2012
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Propos recueillis par T.D et Luc Allain (www.lepetitjournal.com) mercredi 18 juillet 2012
En troisième position sur la liste conjointe PS-EELV La France est notre pays, le monde est notre avenir aux élections sénatoriales de 2011, Mme Kalliopi Ango Ela deviendra officiellement Sénatrice des Français établis hors de France dimanche 22 juillet, en remplacement d’Hélène Conway, nommée en juin Ministre déléguée chargée des Français de l’étranger.
Expatriée au Cameroun depuis 25 ans, Kalliopi Ango Ela est enseignante au Lycée Français de Yaoundé et dirige la Fondation Paul Ango Ela, fondation spécialisée sur la géopolitique en Afrique Centrale. En 2009, elle est élue conseillère à l’Assemblée des Français de l’étranger pour la circonscription du Cameroun, de la République Centraficaine et du Gabon. Lepetitjournal.com l’a reçue dans ses locaux pour une interview-portrait.
Lepetitjournal.com : Pouvez-vous rappeler à nos lecteurs votre parcours ?
Kalliopi Ango Ela : Je suis une Française de l’étranger depuis 25 ans. J’ai donc passé la moitié de ma vie à Yaoundé (Cameroun) où j’ai toujours mes attaches et de fait, j’ai une bonne connaissance de l’Afrique centrale et plus globalement des relations entre la France et l’Afrique.
Tout cela est le fruit d’un engagement de terrain que j’ai voulu progressif. Citoyenne engagée, je me suis lancée très tôt dans la vie associative. J’ai longtemps milité à Français du Monde-ADFE, avant d’être élue à conseillère AFE en 2009.
Mon engagement vise à apporter à la gauche la contribution de l’écologie politique. Je trouve stimulant le fait de pouvoir participer à cette alternance et de pouvoir aussi mettre en application des vœux et recommandations formulés au fil du temps par l’AFE.
Un autre point sur lequel je souhaite insister est l’inégalité qui existe entre les Français de métropole et les expatriés. Ces derniers sont confrontés à des problèmes sociaux parfois graves et ils sont mal armés pour y faire face. Souvent, le rapatriement peut apparaître pour les services consulaires comme la solution. Or, elle n’est toujours pas adéquate. En effet, que se passe-t-il si la personne est en rupture avec la France métropolitaine ou si elle refuse d’être rapatriée ? A l’étranger, on est démuni. Je l’ai d’ailleurs bien vu dans les consulats. Le personnel y effectue un travail de très grande qualité avec des moyens réduits. C’est en général, un personnel de bonne volonté. Avec la réduction des effectifs qui découlait de la RGPP, la délivrance de visas ou d’actes d’état civil prend souvent beaucoup trop de temps ce qui peut avoir des conséquences dramatiques : mariages reportés, familles séparées etc… Il y a un écart très important entre les exigences de l’Etat Civil français et celles des pays de résidence, ce qui rend parfois difficile la transcription des actes, en particulier dans la région d’où je viens.
Toutefois, il faut insister aussi sur la responsabilité des individus. Par exemple en matière de santé, il est de la responsabilité de chacun de souscrire à un minimum d’assurance-rapatriement. On ne peut pas tout reporter sur l’Etat, il faut mettre les gens devant leurs responsabilités sociales. Prenons l’exemple de la paternité. On se retrouve parfois avec des mères de la nationalité du pays de résidence, dont on ne sait pas ce que devient le père français. Si l’enfant n’est pas reconnu, il n’a alors aucun droit vis-à-vis de l’Etat français. S’il l’est, c’est l’Etat qui palie en partie les responsabilités que le père français ne prend pas.
Quels sont les grands axes sur lesquels vous souhaitez travailler ?
L’aspect fondamental est le respect mutuel qui doit exister entre la France et l’Afrique et de manière générale entre le Nord et le Sud. Entre la France et l’Afrique, la relation est affective, compliquée de part et d’autre. Mais elle évolue, elle change, elle n’est plus la même qu’il y a 20 ans. Il faut se départir de la mauvaise conscience, des attentes énormes que certains pays ont vis-à-vis de la France. Il faut repartir sur des bases de respect et d’égalité ; cette dernière a été mise en mal en politique, en économie etc.
Sans être non plus naïf, des rapports de force existent mais n’empêchent pas de revenir à une relation plus respectueuse et cordiale.
Quel est votre point de vue sur l’annonce récente faite par le gouvernement quant à la suppression de la PEC ?
Sur la PEC, il faut accompagner la rapidité de cette décision qui a pris tout le monde de court. Cela va s‘éclaircir. Cela fait 25 ans que je n’ai pas habité Paris et je suis frappée que dans l’hexagone, on est très souvent dans l’anticipation de l’anticipation, si je puis dire. Parfois, prendre un peu de temps, laisser les textes être discutés, amendés et votés, les décisions expliquées permet souvent d’en gagner.
Pour revenir à la PEC, chaque cas sera examiné précisément pour voir à qui cette suppression pose problème. Le tout est de savoir comment on accompagne cette mesure. Bien sûr, l’inquiétude soulevée par la décision est légitime, l’effet de surprise est évident. Mais maintenant, l’important est d’accompagner les familles.
Quelles perspectives voyez-vous pour l’évolution de l’AFE ?
Il faudra renforcer la démocratie locale à l’étranger. Un conseiller AFE, élu sur une circonscription constituée de plusieurs pays, parfois une quinzaine, ne peut pas tout gérer, être présent partout, malgré sa meilleure volonté. Il a besoin de relais sur place, dans chaque pays, auprès de chaque consulat, établissement scolaire, … On peut donc envisager plus d’élus pour avoir une base plus large de conseillers et de relais locaux. Ainsi, on ferait avancer la démocratie locale. Pour les expatriés, ce serait positif, ils se sentiraient mieux représentés à proximité et les taux de participation aux prochaines élections s’en porteront peut-être mieux. Le vote est un engagement citoyen, ceux qui ont voté, si peu nombreux soient-ils, ont montré leur détermination. A l’étranger, la démarche volontaire pour aller voter est encore plus forte. Il arrive dans les bureaux de vote à l’étranger des compatriotes qui passent la journée sur la route pour venir voter. On ressent d’autant plus la « communion républicaine », on se sent soudé. Ceux qui ont voté ont fait un pas envers la Nation, on aimerait
parfois qu’elle nous le rende. D’ailleurs, le 14 juillet est une bell
e occasion pour ressentir cette « communion », peut-être faudrait-il alors encore moins de champagne dans nos ambassades pour que tout Français puisse y participer…